Écriture
Journal De Confinement Jour 9
Au hasard de ma main ce matin, le livre de Sylvia Plath, Carnets intimes, « je veux retrouver cette voie intermédiaire plus normale que je connaissais autrefois, où mon être arrive à imprégner la subs...
Au hasard de ma main ce matin, le livre de Sylvia Plath, Carnets intimes, « je veux retrouver cette voie intermédiaire plus normale que je connaissais autrefois, où mon être arrive à imprégner la substance même du monde : manger, lire, écrire, parler, faire les courses : chaque chose est bonne en soi, et ne se réduit pas à quelque trépidante activité destinée à camoufler la peur qui doit se regarder en face et se livrer un combat fatal, en disant : Une Vie passe ! ». Nos gestes quotidiens se résument à ça depuis une semaine, manger, lire, écrire, parler, faire les courses"¦ J'essaye de ne pas les vivre comme des automatismes, mais un moyen de prendre soin de moi et de mes proches. Ce matin, tôt, l'odeur de la levure qui se dissout dans l'eau tiède envahit notre foyer, mon fils pétrit la pâte. A l'heure où j'écris, le parfum des petits pains ronds et dorés embaument le premier étage et se faufile sous la porte de mon bureau-chambre de bébé. La nuit c'est une chambre et le jour un bureau. Je fais glisser le lit à barreaux sur ses coussinets à l'heure de la sieste et je ris avec ma fille en lui racontant que c'est un navire et que nous sommes sur la mer. Hier soir, dans les derniers rayons du soleil, alors que le froid s'insinuait dans mon dos - je n'avais pas pris la peine de mettre un manteau - nous avons, mon fils et moi, semé des graines dans des pots, potimarron vert, tomate, basilic, petits pois. Chaque jour aussi, depuis le début du confinement, je plante un noyau d'avocat, j'aurais dû leur nouer un nom à chacun, jour 1, jour 2, jour 3, avec quelques mots sur les circonstances de leur plantation, mais je ne l'ai pas fait. Toutes ces choses que j'aimerais faire, qui occupent mes pensées, mais que je n'ai pas l'occasion de réaliser. Les mille bras dont je rêve se mutent en mille pensées qui un jour peut-être émergeront dans un texte, une phrase. Les écoles de mes enfants leur proposent, comme travail de suivi, d'écrire leur journal. Ce qu'ils font, ce qu'ils pensent, mais aussi leurs ressentis par rapport à ce confinement. En français et en néerlandais. Nous leur avons aussi demandé à chacun, à la maison, d'apprendre une langue étrangère, sur un programme en ligne. Moi, les quelques minutes par jour que je peine à dédier au grec ne me mènent pas loin, quel défi d'apprendre une langue dont l'alphabet diffère du nôtre ! Mais j'adore ça. J'aime la musicalité de cette langue. Est-ce aussi pour me consoler de ne pas aller à Loutro encadrer ma résidence d'écriture de printemps ? Proposition d'écriture : Je vous propose d'écrire une scène à partir de cette idée : Quelqu'un sonne à votre porte. Vous vous penchez à la fenêtre et découvrez un homme, vêtu comme au siècle dernier. Il lève les yeux vers vous et vous transmet un message.