Aude Lafait
Écriture

Quand Le Vide Sinstalle

Mon esprit se rapproche doucement du réel, des bruits de vaisselle dans la cuisine, des marches en bois qui craquent. Peu à peu je perçois la lourdeur de mon corps, mon dos endolori par l'allaitement,...
Mon esprit se rapproche doucement du réel, des bruits de vaisselle dans la cuisine, des marches en bois qui craquent. Peu à peu je perçois la lourdeur de mon corps, mon dos endolori par l'allaitement, ma tête traversée par des tiraillements. Seule envie, m'enrouler dans la couette et m'emmêler des heures dans mes images intérieures. L'idée me parcourt comme une onde électrique, et si j'abandonnais l'écriture ? Si l'épuisement venait tarir mon élan créatif ? Et si mes attentes me dépassaient et finissaient par me paralyser ? Et si, et si, et si "¦ Plus je m'éloigne du cÅ“ur de la création, de l'acte d'écrire sans auto-jugement ni regard critique, plus l'envie d'arrêter est grande. Suis-je libre finalement de chercher ailleurs mon bonheur, le sens profond des choses ? Vivre sans écrire, est-ce possible ? Depuis toujours, l'écriture a été là , comme un vêtement collé contre ma peau, ou un tatouage plutôt, invisible, mais dont je sentirais la chaleur, la présence. En cas de pépin, je me connecte à elle, l'écriture m'empêche de sombrer. Je ne suis jamais seule. Quel chemin prendre aujourd'hui ? Sensation de répétition des scènes. Je sais qu'existe ce vide d'après la parution, d'après la naissance. Est-ce tout simplement trop, naissance de ma fille il y a six mois, sortie de mon livre il y a un mois ? Je n'ai ni l'envie ni la force. Mon roman situé en Tanzanie ne m'appelle plus, me documenter sur les enfants disparus pour le prochain projet me laisse indifférente. Un journal achevé attend, ensevelit sous des piles de livres, sur mon bureau. Le vide, un temps, permet-il à la source de se ranimer ?